lundi 28 avril 2014

Ressentir une émotion

(Sur le fil "Défusion..." du forum de Linecoaching. J'y reprends l'article de mon blog sur Caliméro, ma première expérience de défusion.)
9/03/14

J'ai tenté la défusion, aujourd'hui.

La première émotion négative que j'ai pu voir en face, c'est la frustration, il y a quelques jours. Depuis, je n'en ai plus peur, je la reconnais presque tout le temps et assez rapidement. Je n'irai pas jusqu'à dire que je l'accepte, mais en tous cas, en ce moment, je ne mange plus pour la recouvrir. Je mange pour me réconforter, parfois, mais plus pour recouvrir la frustration. Vu de loin, ça semble revenir au même, sauf qu'en terme de réconfort effectif et de quantité de nourriture, ça n'a rien à voir ! Un carré de chocolat suffit à me réconforter, alors que pour recouvrir ma frustration, j'avais besoin d'une bonne EME de fin de repas avec dessert ET chocolat, par exemple, et que ça ne me réconfortait pas, il fallait que je me recentre sur ma respiration, puis sur mes sensations, pour choisir consciemment de me laisser guider par ma non-faim. Accepter la frustration est beaucoup plus simple et beaucoup moins... frustrant ! Du moins, en ce moment, peut-être parce que c'est tout frais, donc j'y suis attentive. En tous cas, clairement, ça consomme moins d'énergie nerveuse !

La deuxième émotion, (c'est cet après-midi que tout d'un coup, j'ai pu mettre un mot dessus) c'est le sentiment d'injustice. Depuis quelques jours, ma faim est toute petite, encore plus qu'avant. J'ai l'impression d'être revenue à il y a quelques mois, quand j'ai découvert que j'avais un petit appétit. J'ai dû faire le deuil de mon gros appétit imaginaire. Depuis une semaine, il est encore plus petit. Bon, donc je me sers des outils de Linecoaching pour déguster les aliments, repérer le rassasiement spécifique, et déclencher ma faim aux heures des repas.

Mais... ça m'éneeeeeeerve ! Et je ne savais pas pourquoi. Ce n'était pas la frustration, je commence à la connaître un peu. Je pense maintenant que c'est le sentiment d'injustice.

Mais autant la rencontre avec ma frustration m'avait étonnée et amusée (j'avais l'impression d'une expérience mystique, d'une rencontre du troisième type !), et depuis, je la vois avec bienveillance, autant la découverte de mon sentiment d'injustice ne m'a pas amusée du tout. Parce que, hein, c'est pas juste ! Pourquoi moi ???

Alors du coup, j'ai défusionné (j'ai relu le fil il y a peu, c'était encore frais dans ma tête). J'ai identifié l'émotion, je l'ai étiquetée « Sentiment d'injustice », et j'ai exprimé tout ce que ça me déclenchait et que je laissais inexprimé : c'est vraiment trop injuste que je fractionne autant, alors que d'autres mangent avec faim des quantités bien supérieures, c'est vraiment trop injuste que je doive galérer autant pour identifier mes émotions alors que d'autres les reconnaissent les doigts dans le nez, c'est vraiment trop injuste que mon appétit prévisionnel soit moins facile que la semaine dernière, c'est vraiment trop injuste que peut-être je vais être un « tout petit appétit » qui aura besoin de compléments alimentaires pour ne pas être en carence... Ensuite, j'ai surnommé l'état qu'elle génère chez moi (l'énervement, la bouderie) « La complainte de Caliméro » (j'aimais beaucoup Caliméro), et ça m'a détendue.

Pour le moment, ça a marché : j'ai moins peur de mon sentiment d'injustice, et ça m'a amusée, donc rendue disponible pour une autre rencontre avec Caliméro. Je ne sais pas encore si ça va m'aider à mieux vivre le moment où ça reviendra mais c'est la première fois que j'ai un outil pour traverser ça. Le sentiment d'injustice, maintenant que je l'ai identifié, je me souviens l'avoir ressenti (comme un énervement nébuleux sans cible précise) pendant des régimes ou des arrêts de régimes ou dans plein d'autres situations non liées à l'alimentation. Mais jamais je ne l'avais exprimé clairement à fond, jamais nommé, et jamais je n'avais pensé qu'il y avait un outil pour m'aider.

Je me rends compte qu'il y a peut-être beaucoup d'autres « énervements nébuleux » qui sont en réalité des émotions, et que je peux m'autoriser à ressentir au lieu de les laisser dans leur nébulosité.

Mais parfois, j'ai l'impression de ne pas savoir mettre des mots dessus. Soit je ne sais pas, soit j'ai tellement pris l'habitude de ne pas les prendre en compte que j'ai atrophié cette capacité. Parce que là, quand même, j'ai l'impression d'avoir découvert une mine d'or alors que j'ai juste identifié le sentiment d'injustice. Maintenant, ça ne me semble pas si compliqué. Mais avant d'avoir mis un nom dessus, ça l'était ! C'était un énervement insurmontable et sans fin, qui me faisait hésiter à manger parce que je ne savais plus si j'avais faim ou pas (vive le Dr Zermati qui a dit que si on n'était pas sûr, ça n'était pas de la faim ! Ca a été mon phare, ces derniers jours !) Maintenant que ça a un nom, ça semble tout banal. Peut-être qu'en fait, je sais les nommer, mes émotions, mais que le mot me semble tout petit par rapport à l'effet gigantesque que ça a sur moi. Alors que peut-être, l'effet gigantesque, ça n'est pas celui des émotions, c'est surtout celui de les rejeter.

Je me rends compte maintenant pour de vrai, dans mon expérience, pas seulement parce que j'ai été convaincue après l'avoir lu, que le parcours du poids repose sur le parcours du comportement alimentaire qui lui-même repose sur le parcours de l'acceptation des émotions, qui lui-même repose sur le parcours de l'identification des émotions. C'est des poupées russes ! (C'est vraiment trop injuste d'être obligée de décortiquer des poupées russes au lieu d'être d'emblée une mangeuse régulée ! Bon, après, si j'étais une mangeuse régulée, je ne découvrirais pas tout ça, et quand même, c'est passionnant !)


(Un échange m'a permis de voir que si c'était si difficile, c'est parce que je le prenais par le mauvais bout. Je trouvais vraiment difficile de devoir d'abord nommer l'émotion pour la ressentir. En fait, c'est l'inverse : on ressent, ce qui permet de nommer, puis on reconnaît l'émotion.)


D'accord, oui, je comprends. En fait, j'ai accepté de ressentir l'émotion, quelle qu'elle soit, et ça n'est qu'après avoir accepté de la ressentir que j'ai pu l'identifier.
Du coup, ça me semble moins difficile, parce qu'identifier une émotion, c'est pas de la tarte ! Ca me semblait un travail purement intellectuel. Alors que l'acceptation, ça n'est pas aussi compliqué. Enfin, si, c'est compliqué (sinon, on ne serait pas là à tourner autour !). Mais une fois qu'on est prêt à essayer, c'est nettement moins compliqué que de "se raisonner" ou de temporiser pour ne pas manger lors d'une EME.

L'EME-zen me semble plus logique, vu comme ça, et plus faisable. Mais c'est vraiment un outil compliqué. Il sert à se laisser le temps d'accepter l'émotion pour l'identifier au lieu de penser qu'elle est si puissante qu'on ne peut pas ne pas manger. J'ai eu de la chance de commencer ce parcours en toute confiance. J'ai utilisé l'EME-zen comme j'ai pu, comme un outil de temporisation, pour "me raisonner" purement intellectuellement, et c'est le fait de l'utiliser qui a permis que je me laisse du temps pour voir ce qui se passait à l'intérieur au lieu de le recouvrir par de la nourriture, et qui fait que maintenant, je comprends à quoi il sert et que je ne m'en servais pas trop bien. Si je n'avais pas eu confiance dans ce parcours, je l'aurais laissé de côté et je serais passée à côté de tout ça, qui est quand même une clef importante pour une mangeuse émotionnelle.

Je suppose que c'est une question de temps, de moment ? En ce moment, je suis dispo pour ce travail sur moi, mais d'ici quelque temps, je ne le serais plus (boulot, soucis divers). Je profite de cette "fenêtre de disponibilité", où j'ai beaucoup de temps pour moi, pour bien ressentir tout le bien que ça apporte, cette espèce de libération, comme un poids qui s'en va, et quand il revient (la frustration, par exemple), je le reconnais, il ne m'emprisonne plus parce que je ne l'emprisonne plus. Si ce bien-être me devient familier, je le rechercherai peut-être plus facilement quand je serai dans la tourmente, au lieu d'entasser mes ressentis comme un tas de bouquins à lire quand j'aurai le temps.
En tous cas, merci pour ce fil. Ca met des mots simples sur des notions complexes, ça traduit en actes des idées, ça donne des exemples concrets de comment on peut faire avec nous-mêmes et l'enfant en nous.

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